En 1990, à l’initiative de l’ALEPS (Association pour la Liberté Economique et le Progrès Social), 600 universitaires de toute l’Europe avaient signé un manifeste libéral « pour l’Europe des Européens ». Malheureusement cet appel à la sagesse n’a pas été entendu et quelques mois plus tard le Traité de Maastricht, acte fondateur de l’Union européenne, était signé qui n’a depuis cessé d’éloigner l’Europe des principes du libéralisme.

Le 9 juin prochain une nouvelle occasion est donnée aux Français de peser sur le futur de l’Union européenne – et donc sur le futur de chacun d’entre-nous. Dans cette perspective, un nouveau Manifeste a été rédigé. Il a déjà recueilli les signatures de nombreux universitaires et intellectuels de toutes disciplines, chefs d’entreprises et hommes politiques. Le Manifeste rappelle une fois encore les grands principes de la liberté qui devraient guider l’Union européenne pour l’écarter de la dérive dirigiste, bureaucratique et idéologique dans laquelle elle s’enferme.

Ce texte, dont la rédaction doit beaucoup au Comité de rédaction du Journal des libertés paraîtra prochainement dans la grande presse. Nous en offrons ici la primeur à nos lecteurs.

Renouer avec la tradition européenne

L’Europe ne relèvera le défi de la mondialisation et ne développera durablement la prospérité générale qu’en restant attachée à ses valeurs communes : le respect de la liberté et de la dignité de la personne humaine, la propriété individuelle, l’économie de marché et l’état de droit.

Mais l’Europe est riche aussi de ses diversités, propices à la création intellectuelle, artistique et économique, à la recherche empirique des chemins du progrès.

Plutôt que de transformer l’Europe en un super État souverain qui impose à tous ses membres un droit tentaculaire, il faut alléger les institutions communautaires et redonner la priorité à la pratique des libertés et droits individuels. L’Europe doit revivifier le principe de subsidiarité qui veut que la sphère politique soit réduite aux missions régaliennes et que les décisions soient prises aux niveaux local, régional, national plus proches des citoyens concernés.

Harmonie européenne

Les quatre libertés fondamentales sont celles du libre-échange des biens, de la libre circulation des services, des capitaux et des hommes (incluant la liberté d’établissement). Ces libertés nous paraissent suffisantes pour aboutir à une véritable harmonie européenne susceptible d’être étendue à tous les pays européens qui le souhaitent.

Assurément l’harmonisation n’est pas l’uniformisation technocratique qui se dessine à Bruxelles, elle est plutôt l’union des patries et des citoyens libres dans un marché libre et concurrentiel autant que la poursuite de leurs échanges culturels et sociaux qui ont fait grandir notre civilisation.

Voilà pourquoi, pour assurer la meilleure protection sociale des Européens nous préférons favoriser le libre choix individuel des systèmes d’assurance sociale et de retraites.

Voilà pourquoi, pour éviter que les Européens supportent un fardeau fiscal nuisible à leur économie comme à leur développement personnel, nous souhaitons conserver la concurrence fiscale entre États, elle prémunit les contribuables des pires excès, tout comme la concurrence entre les entreprises protège les consommateurs.

A cet égard, nous pensons encore que trop de réglementation européenne attente à la vitalité du marché européen qui se porterait mieux d’une reconnaissance mutuelle des normes prévue jadis dans le projet de marché unique.

Élargir la concurrence

Nous considérons qu’il n’y a pas de raison pour que certains domaines d’activité échappent à ces libertés fondamentales :

– la Politique Agricole Commune a toujours pénalisé le pouvoir d’achat des Européens, elle a entrainé des gaspillages scandaleux et créé des privilèges exorbitants pour quelques-uns, sans apporter à la masse des agriculteurs la moindre solution à leurs problèmes ;

– les grands programmes industriels n’ont souvent pas d’autre effet que de stériliser l’innovation et la créativité, et de fausser la concurrence ;

– la politique commune de l’environnement et de l’énergie a ses limites car nous croyons dans ce domaine comme ailleurs aux bienfaits de la décentralisation et du marché dans un cadre de droit rénové, où la propriété privée jouerait mieux son rôle ;

– la liberté d’expression doit être respectée dans tous les domaines, y compris ceux afférents aux changements climatiques.

Nous voulons moins de cartel, moins de lobbies, moins de privilèges, moins de monopoles.

Nous voulons moins de nomenklaturas bureaucratiques, moins de caste politique dirigeante.

Nous voulons moins d’entreprises publiques si souvent sclérosées et plus d’initiatives privées.

Plus de droit, moins de lois

Nous approuvons sans réserve les efforts menés pour restaurer une vraie démocratie européenne. Mais celle-ci ne se fondera pas sur la multiplication d’institutions, de comités et de fonctionnaires européens usurpateurs des libertés individuelles. Elle a plutôt besoin de plus de reconnaissance et de protection des droits individuels des Européens à vivre selon leurs choix. Elle se fortifiera moins de l’uniformisation des conditions de vie que de la facilité des échanges entre des membres fiers de leurs différences.

Nous appelons de nos vœux une Europe qui évite les pièges du collectivisme, du populisme et du nationalisme, une Europe qui puisse trouver la route de la liberté pour éviter celle de la servitude.

Nous appelons de nos vœux une Europe qui ne soit plus une machine à réglementer jusqu’au plus intime de nos vies et qui mette fin à son harcèlement textuel.

Nous appelons de nos vœux une Europe qui ne se présente plus comme un super-État social qui surplombe des États déjà trop socialisés.

Nous appelons de nos vœux une Europe qui soit moins impériale que subsidiaire.

Que ceux qui entendent cet appel se joignent à nous pour alerter l’opinion publique et persuader les Européens qu’ils ont une chance historique à saisir et qu’ils ne doivent pas remettre leur sort entre les mains de ceux qui par intérêt personnel ou partisan ont réduit les libertés et détruit l’espoir du progrès et de la paix.

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Pierre Garello

Pierre Garello est Professeur d’économie à Aix-Marseille Université (AMSE) où il co-dirige un Master d’économie du droit. Il est éditeur du Journal des économistes et des études humaines (www.degruyter.com/view/jeeh) et Président de l’Institute for Economic Studies – Europe (www.ies-europe.org)

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