1962-1963, James Buchanan est président de la Southern Economic Association (SEA). À ce titre, il est chargé de faire le discours présidentiel lors du colloque annuel de l’association qui se tient en novembre 1963. Buchanan choisit un texte qu’il a commencé à ébaucher en 1962, dont la première version dactylographiée date de janvier 1963 et qui s’intitule « What Should Economists Do ? ». Cela deviendra l’un des articles les plus importants de Buchanan. Un article « iconique » (Vaughn, 2014, 918), parce que Buchanan y présente ce qui ressemble à un programme de recherche original, le programme de recherche de Buchanan selon lequel il faut penser l’économie comme science de l’échange et des marchés, plutôt que comme science du choix et de l’allocation des ressources.
Présenter « What Should Economists Do ? » dans ces termes ne dit rien cependant (et ne peut évidemment rien dire) de l’analyse que Buchanan mène pour en arriver à de telles conclusions. Cela ne permet donc qu’une compréhension partielle de l’article de Buchanan. Pour aller plus en profondeur il faut savoir pourquoi les économistes ne devraient-ils pas s’intéresser aux choix (même individuels), et pourquoi définir l’économie comme science de l’échange (ou comme catallaxie) ? Avec quelles conséquences ? Quel type d’échange ? Et aussi, quelles sont les références de Buchanan ? Qu’y a-t-il de spécifique dans son approche ? En quoi est-elle différente d’autres approches qui conçoivent elles aussi l’économie comme catallaxie ou comme praxéologie (c’est-à-dire, les approches des économistes autrichiens, tel Ludwig von Mises ou Friedrich Hayek) ?
Tenter de répondre à ces questions permet donc de clarifier le message de Buchanan sur le choix et l’échange. Cela permet aussi de comprendre pourquoi Buchanan choisit d’écrire ce texte, et de réaliser que « What Should Economists Do ? » est une étape dans la carrière de Buchanan bien plus que la formulation claire d’un programme de recherche déjà établi. En effet, même si Buchanan semble ne pas douter de ce qu’il écrit, il changera néanmoins d’avis sur certains points de l’article. Nous proposons ici une analyse approfondie de cet article fondamental de Buchanan.
Le souhait de persuader
L’article de Buchanan frappe d’abord par son côté critique, et tout particulièrement par son ton. Il dénonce une attitude générale mais remet aussi en cause explicitement des individus : Frank Knight, son propre mentor, Milton Friedman, George Stigler, Jacob Viner et Lionnel Robbins. Ce dernier fait d’ailleurs l’objet des attaques les plus vives. Buchanan écrit : « Je considère Lord Robbins comme un adversaire » (p. 214) – dans une version précédente, il avait même écrit, « Je considère Lord Robbins comme mon adversaire ». La raison : sa « définition » de l’économie, « trop convaincante » qui « a eu pour effet de retarder plutôt que d’avancer le progrès scientifique » (p. 214). Buchanan procède donc clairement à une critique ad hominem.
Buchanan justifie lui-même cette façon de faire en invitant ses lecteurs à considérer « What Should Economists Do ? » comme un « essay in persuasion » (p. 214)[1].
L’expression peut sembler assez vague et neutre. Pour un élève de Knight comme Buchanan, elle ne l’était probablement pas. Knight donnait en effet un sens précis au mot persuasion, qu’il opposait à la discussion. Pour Knight, persuader signifiait chercher à « vendre » des positions déjà établies (qu’on ne cherche donc pas à faire évoluer, à discuter), ou à influencer les croyances ou comportements des autres. La discussion, au contraire, consiste à viser, si ce n’est à atteindre, d’une façon « coopérative » et « impersonnelle », la vérité scientifique (Knight, 1933, xxxiii). Le rôle du scientifique, de l’universitaire est (ou devrait être) de s’engager dans des discussions, plutôt que de tenter de persuader. C’est d’ailleurs ce que Knight avait déclaré faire dans l’allocution prononcée en 1950 en tant que président de l’American Economic Association, insistant sur son désir de placer la vérité au-dessus de toute les autres valeurs (Knight 1951).
Buchanan n’ignorait certainement pas cette distinction, pas plus qu’il n’ignorait le texte de Knight de 1951. Le fait de revendiquer la persuasion, et de choisir ce ton, tout sauf impersonnel et coopératif, indiquait clairement qu’il savait ce qu’il faisait. Il n’avait pas écrit ce texte, au moins en partie, pour engager la discussion et viser à la vérité ! D’ailleurs, Knight avait compris le message. Après la publication de l’article en Janvier 1964, Buchanan envoie un tiré-à-part à Knight qui répond que la lecture lui avait permis de comprendre que Buchanan avait voulu « bouleverser les esprits » au moins autant « que promouvoir la ‘vérité’ »[2].
La réponse de Buchanan à Knight semble confirmer qu’il y avait bien un choix de la part de Buchanan. Ce dernier, en effet, répond que Knight avait raison, qu’il avait vu juste et que c’était bien l’intention de Buchanan que de susciter des commentaires[3]. Il accepte donc la remarque de Knight sans avoir l’air surpris ou choqué d’être accusé de ne pas vouloir promouvoir la vérité.
Qu’il y ait eu un choix est confirmé par le fait que Buchanan savait depuis longtemps que son article était polémique. Le 24 mai, Buchanan présente « What Should Economists Do ? » en séminaire interne et note ensuite : « L’article va provoquer des débats. Cela semble à présent évident.[4]» De mai à novembre, Buchanan aurait eu le temps de modifier son texte s’il avait été gêné par ces possibles débats. Il ne l’a pas fait : la version de mai est quasiment identique à la version de novembre. Il acceptait donc bien d’être dans cette logique de la persuasion, plutôt que dans celle de la discussion.
Des tentatives de discussion infructueuses
Pourquoi avoir choisi une telle stratégie ? Il est évidemment impossible de le savoir précisément. On peut toutefois suggérer une réponse : Buchanan avait, depuis longtemps et de manière répétée, essayé d’engager dans une discussion académique, au sens Knightien du terme, avec ses collègues. Mais avec un succès très limité.
Par exemple, en 1955, juste après la publication de l’article de Paul Samuelson sur la théorie des finances publiques (« A Pure Theory of Government Finance », 1954), Buchanan avait envoyé à Samuelson un commentaire écrit pour expliquer la nature de son désaccord et aussi comment leurs perspectives pouvaient converger. Pas convaincu, Samuelson avait répondu sans entrer dans une discussion qu’il n’y avait pas lieu d’avoir. Buchanan, ne se décourageant pas, avait malgré tout continué à écrire, tâtonnant pour essayer de trouver une position commune. En vain.
Quelques années après, Buchanan publiait son premier livre majeur écrit seul, Public Principles of Public Desbt (1958). Il expliquait dans cet ouvrage pourquoi le courant dominant en finances publiques – qu’il appelait la « nouvelle orthodoxie » – se trompait en matière de dette publique. L’ouvrage avait été accueilli dans une demi-indifférence, plutôt comme un travail polémique et dont la valeur dépendait du degré de polémique suscité. Les arguments n’avaient pas vraiment été considérés avec soin. En particulier, rien n’avait été dit sur la question du poids de la dette qui, selon Buchanan, ne pouvait porter que sur les générations futures. L’idée attira quand même l’attention, au point que l’American Economic Review y consacra un symposium (1961). Non pas à cause de ce qu’avait écrit Buchanan, cependant, mais en raison d’un article écrit par trois économistes de Princeton (Bowen, Davis and Kopf 1960). Buchanan avait lancé une discussion, qui avait lieu sans lui.
Grâce à sa correspondance avec Gordon Tullock, on comprend combien cela avait affecté Buchanan, peut-être autant que la tentative de dialogue avortée avec Samuelson. Ce n’était pourtant pas grand-chose comparé à ce que Buchanan ressentit lorsqu’il fut accusé d’être un idéologue par les gens de la Ford Foundation et par ses collègues de l’Université de Virginie. Au début des années 1960, la recherche menée au sein du Thomas Jefferson Center for the Study of Political Economy – que Buchanan avait créé avec Warren Nutter en 1957 pour réinventer l’économie politique classique de la fin du 18ème siècle – fut présentée comme une tentative entièrement dédiée à la promotion du marché, à tel point que la Ford Foundation refusa de financer le Centre. L’Université de Virginie diligenta alors une enquête (voir Medema 2009 ; Levy et Peart 2013, 2020), au désarroi de Buchanan pour qui cela n’avait aucun sens. Il était un scientifique, pas un idéologue – que les travaux des membres du Thomas Jefferson Center soient publiés dans des revues académiques en était la preuve. Là encore, la tentative d’engager une discussion scientifique tournait court.
Ces échecs répétés pour engager une discussion, pour mettre la recherche de la vérité au-dessus des autres valeurs, pourraient expliquer le choix d’une autre méthode pour faire passer ses idées, à savoir la persuasion. Et, plus précisément, persuader ses collègues économistes que l’économie ne devait plus être conçue comme une science du choix, mais comme une science de l’échange.
En effet, ainsi que nous l’avons déjà évoqué, l’article de Buchanan est construit autour de l’opposition entre deux économistes et deux approches pouvant être adoptées en économie : d’un côté Robbins et l’économie comme science du choix et de l’allocation des ressources ; et de l’autre Smith et l’économie comme une science de l’échange et des marchés. Et, s’il fallait opter pour l’une ou l’autre de ces méthodes, la recommandation de Buchanan était claire : les économistes s’étaient trompés en suivant Robbins, ils auraient dû et devraient suivre Smith. Buchanan disait donc à ses collègues d’abandonner le choix, et de se concentrer sur l’échange. Les économistes, écrivait Buchanan, doivent voir leur discipline comme une « catallaxie sophistiquée » (p. 214).
Contre l’économie comme science du choix
Le refus par Buchanan de concevoir l’économie comme science des choix et de l’allocation des ressources est sans aucun doute lié à son rejet de l’utilisation des fonctions de bien-être social pour déterminer l’allocation des ressources. C’est pour cette raison qu’il avait critiqué les vues de Kenneth Arrow sur la démocratie comme mécanisme de choix collectif basé sur la maximisation d’une fonction de bien-être social (1951).[5] C’est également sur cette raison que s’appuyait sa critique de l’analyse des finances publiques proposée par Samuelson, et en particulier de l’idée de choisir la quantité de biens publics à fournir à partir de la maximisation d’une fonction de bien-être social (1954[6]. C’était, plus généralement, la raison de l’opposition de Buchanan aux économistes du bien-être et à leur contrepartie politique, les « dirigistes », qu’il voyait gagner de plus en plus de pouvoir politique au début des années 1960 (voir Marciano 2024).
Avant que Buchanan et Tullock ne publient leur fameux ouvrage, The Calculus of Consent (1962), partir d’un cadre d’allocation des ressources était la méthode qui avait été généralement adoptée par les économistes qui avaient étudié les phénomènes politiques (voir Mitchell 1961, p. 79). Parmi eux, il y avait George Catlin, un précurseur de la théorie du choix public (Mitchell 1993 ; Gorman 2016). Catlin suggérait qu’il n’y avait pas de différence entre l’économie et la politique, parce que les deux sont des moyens de faire des choix. Et il affirmait aussi que l’ouvrage de Robbins, Essay on the Nature and Significance of Economic Science, devait être la référence pour ceux qui étudient la politique comme pour ceux qui étudient l’économie (1933, p. 463). On peut aussi citer David Easton qui mettait l’accent sur l’aspect décisionnel de la science politique (1951, p. 471). Selon Easton, les politologues analysent la relation entre l’utilisation et la distribution du pouvoir dans la formulation et l’exécution des politiques sociales, tout comme les économistes se concentrent sur l’allocation et la distribution de l’argent ou des biens.
Certains économistes, comme Joseph Spengler et Duncan Black, soulignaient eux aussi la proximité entre l’économie, la politique et le choix. Spengler notait que « [l]es deux sciences sont donc beaucoup concernées par les problèmes d’allocation et de choix collectif » (1950, p. 374). Black insistait sur le fait que l’économie et la politique « cherchent à répondre pratiquement à la même question » (1950, p. 512) : « chacune se rapporte à un type de choix » (1950, p. 514). L’économie et la politique formaient essentiellement deux branches du même sujet – « la théorie des choix économiques et politiques » (1950, p. 514). Dit autrement, les institutions politiques étaient considérées comme ayant un problème économique à résoudre, la détermination de l’allocation optimale des ressources politiques ou économiques rares. Un point qui sera aussi mis en avant par Anthony Downs (1957a, b) ou Gary Becker (1958).
Or, les premières critiques de l’ouvrage du Calculus of Consent présentaient le livre comme faisant partie de cette tradition (Riker 1962 ; Manne 1963). Cela pouvait se comprendre : Buchanan et Tullock avaient en effet écrit qu’ils développaient un modèle visant à expliquer la prise de décision politique, ou qu’ils proposaient « une théorie praxéologique interne cohérente du choix politique. » (1962, p. 29) Si cela signifiait faire partie de la même tradition que les économistes du bien-être que Buchanan critiquait tant et plus, on comprend qu’il eut souhaité distinguer son approche de celle adoptée par ces économistes.
Buchanan identifiait deux problèmes avec l’approche dominante. Prendre le choix comme référence est problématique en premier lieu parce que cela rend possible un glissement d’une analyse des choix individuels vers une analyse des choix collectifs. L’économie, en tant que science du choix, pourrait ainsi analyser n’importe quel type de choix. On peut résumer le problème à partir d’un syllogisme (Marciano 2009) : (1) l’économie concerne l’allocation des ressources rares, les contraintes et les choix ; (2) les individus et les groupes sont confrontés à des problèmes d’allocation de ressources rares ; (3) par conséquent, l’économie doit expliquer comment les groupes, les entités collectives, prennent des décisions. Un tel glissement n’était possible que sous l’hypothèse (implicite) que les groupes existent indépendamment des individus, qu’ils prennent des décisions sur l’allocation des ressources. Or, pour l’individualiste qu’est Buchanan, cela est faux. Les groupes ne sont rien d’autre que des individus. Ils n’agissent pas.
Se concentrer sur le choix est également problématique parce que cela conduit à ignorer l’incertitude. Buchanan affirmait que les problèmes auxquels les individus sont confrontés en l’absence d’incertitude ne relèvent pas du domaine de l’économie. Lorsque les situations ne contiennent aucun élément d’incertitude, cela signifie que les individus « savent ce qu’ils veulent ». Transposé en termes économiques, cela implique que les préférences individuelles sont données ou que la « fonction d’utilité de l’agent choisissant est entièrement définie à l’avance » (1964, p. 217). Dans de telles circonstances, ou si l’on suppose que de telles circonstances prévalent, les « comportements » individuels peuvent difficilement être considérés comme des choix. Ce sont des décisions qui sont « purement mécaniques » (p. 218) mais ce ne sont pas de vrais choix. Par conséquent, les problèmes associés à de telles décisions sont « technologiques » ou « calculatoires » mais pas économiques. Un ordinateur pourrait faire ces choix pour les individus. De même, un ordinateur ou tout observateur externe pourrait déterminer la solution aux problèmes posés par les choix dans de telles situations ou sous de telles hypothèses. En conséquence, il s’agit de problèmes pour les scientifiques ou pour les ingénieurs sociaux mais pas pour les économistes. Ainsi, en se concentrant exclusivement sur des choix individuels ou collectifs – le choix comme une forme de comportement prévisible, ainsi qu’ils le conçoivent depuis Robbins –, les économistes transforment leur discipline en une science computationnelle et technique ; en une forme de « mathématique appliquée » ou de « science de la gestion » (p. 216). Autrement dit, ils s’occupent de problèmes dont ils ne devraient pas s’occuper. Ils ne sont plus économistes mais sont devenus des ingénieurs sociaux.
Choix versus échange: Robbins, Mises et les Autrichiens
Si l’opposition de Buchanan au choix et à Robbins s’explique par les raisons mentionnées dans le paragraphe précédent, il y a quelque chose de plus qui doit être explicité et qui concerne l’opposition à Robbins. Ce point est important pour comprendre l’article mais il reste très implicite et difficile à percevoir sans une approche historique.
Au moment où Buchanan écrit son article, il sait que Robbins est généralement considéré comme faisant partie de la même tradition épistémologique que Friedrich Hayek, Ludwig von Mises ou Israel Kirzner (même si Robbins est vu comme une version moins aboutie de la praxéologie de Mises). Telle est l’opinion de Knight (1934), entre autres références importantes, mais aussi de Murray Rothbard (1957, 1962, par exemple). Or, Mises liait la science de l’action humaine, la praxéologie, à l’échange, ou catallactique. Pour lui, l’économie ou la catallactique était la « partie la mieux développée » de la « science théorique de l’action humaine, la praxéologie » (1944, p. 527 ; voir aussi Mises, 1949, p. 3). Dans cette perspective misésienne-robbinsienne, l’échange et le choix n’étaient donc pas séparables mais bien plutôt complémentaires : c’est parce que les individus choisissent qu’ils sont conduits à échanger. C’est exactement le contraire de ce que Buchanan affirmait dans son article : pour lui, c’est en effet bien d’une opposition qu’il s’agit entre choix et échange. Il y a Robbins, d’un côté, et Smith, de l’autre. Les économistes sont face à une alternative, l’économie peut être définie comme science du choix ou comme catallaxie, pas les deux.
Le fait que Mises rejetait cette séparation est très important pour une bonne compréhension de « What Should Economists Do ? ». Pour Mises, échange et choix n’étaient pas incompatibles. Entre Robbins et Smith, il n’était pas nécessaire de choisir. Et c’était également le point de vue développé par Kirzner dans sa thèse The Economic Point of View. An Essay in the History of Economic Thought (1960); thèse réalisée sous la supervision de Mises[7]. Et c’est encore ce que Kirzner écrivit dans une note commentant l’article de Buchanan.
La note fût publiée à la fin de l’année 1964, mais, dès Mars, Kirzner en envoie une copie à Buchanan. Kirzner et Buchanan se connaissaient. En 1959, ils avaient participé à une conférence à Chapel Hill (Caroline du Nord) et avait entamé une discussion sur la méthodologie de l’économie. Le contenu de la discussion est perdu, mais il n’est pas impossible de penser que cette discussion ait été liée au thème de l’article de Buchanan, le choix et l’échange, puisque Kirzner écrit dans cette note à Buchanan que son commentaire est un moyen de poursuivre la discussion[8].
Kirzner trouvait l’article de Buchanan « excellent ». Mais il n’était pas d’accord avec Buchanan. Pour lui, les économistes pouvaient étudier l’échange et les relations de marché tout en restant dans un cadre « à la Robbins », c’est-à-dire centré sur le choix. Non seulement, il n’y avait pas d’opposition, mais il pensait que les deux perspectives étaient complémentaires (Kirzner, 1965, p. 258)[9]. Il ajoutait même que supposer que les individus font des choix, ont des buts qu’ils cherchent à atteindre, est le seul moyen que les économistes et les sciences sociales en général ont d’avoir accès à des données empiriques. La praxéologie que Kirzner défendait partait donc d’individus faisant des choix et étant conduits à échanger pour atteindre leurs objectifs. C’était aussi ce que faisaient Mises, Hayek ou Murray Rothbard et Kirzner lui-même – Kirzner étant le seul mentionné dans l’article de Buchanan.
L’absence de références à ces économistes dont les réflexions étaient proches de ce que Buchanan faisait pouvait, et peut toujours, surprendre. Buchanan parlait de « logic of choice » sans citer ou même mentionner Hayek, lequel avait pourtant expliqué en quoi consistait cette économie conçue comme « logic of choice » dans un fameux article de 1937, « Economics and Knowledge ». Buchanan définissait l’économie comme « catallactique » sans se référer non plus à Mises qui avait utilisé le terme (1944, p. 527; 1949, p. 3).
Des oublis ? Non. Dans sa réponse à Kirzner, Buchanan expliquait qu’il y avait un paragraphe dans lequel il expliquait les différences entre son approche et celle de Mises, Hayek et Kirzner mais qu’il l’avait enlevé de la version finale par manque de place.[10] Dans ce paragraphe, Buchanan expliquait qu’une conception de l’économie comme science du choix impliquait l’absence de limites, supposait que les économistes pouvaient étudier n’importe quel choix. Or, il pensait qu’il fallait mettre des limites au domaine de l’économie, en exclure l’étude de certains « problèmes » (ibid.)[11]. Donc, il s’opposait à une « logique globale de l’action humaine » à la Kirzner ou à la Mises[12].
Cependant, Buchanan ne fermait pas totalement la porte aux Autrichiens (une porte qu’il allait d’ailleurs bientôt ouvrir, comme on le sait). Il admettait « que l’argument de Hayek, Mises, Kirzner représente une amélioration significative par rapport à la conception ouverte de la « logique du choix » de Robbins ». Il aurait donc pu faire une distinction entre une science du choix à la manière de Robbins et la logique du choix des Autrichiens. Il ne l’a pas faite. Jamais dans le texte, Buchanan ne semble envisager cette perspective. On peut spéculer sur les raisons d’agir ainsi. Peut-être était-ce lié avec la manière dont Rothbard faisait l’éloge de la dimension autrichienne du travail de Robbins et critiquait le travail de Buchanan. Les critiques de Rothbard sur Prices, Income, and Public Policy (Allen, Buchanan, and Colberg, 1959 ; voir Rothbard 1959, pp. 295-301) et ensuite sur The Calculus of Consent (1962, in Rothbard, 2011, pp. 927-932) étaient sévères. Il n’est pas impossible que Buchanan, au courant de ces critiques, se soit opposé à Robbins et Mises également à cause de Rothbard.
Échange, catallaxie et coopération
Si l’économie ne doit pas être une science du choix, elle doit être une science de l’échange. Les économistes, écrit Buchanan, « devraient concentrer leur attention… sur l’échange plutôt que sur le choix » (p. 217). Ou encore, plus précisément, l’économie devrait être une « catallaxie sophistiquée » (p. 214). Pour justifier l’emploi de ce terme, Buchanan ne se référait pas à Mises – ce qu’on peut interpréter comme la confirmation de son désir de s’en démarquer – mais à Richard Whately. Archevêque et économiste politique, Whately fut en effet le premier à proposer une (re)définition de l’économie politique comme catallactique dans ses Introductory Lectures on Political Economy (1832).
Buchanan suivait d’ailleurs assez fidèlement l’analyse de Whately. Par exemple, quand Buchanan écrit que, « [s’il] devai[t] donner [son] avis, [il] proposerai[t] que nous cessions immédiatement de parler d’ “économie” ou d’ “économie politique”, bien que ce dernier terme soit bien supérieur » (1964, p. 217), cela fait parfaitement écho aux « objections au nom de l’économie politique » formulées par Whately (1832, p. 6) qui déplorait qu’il soit « maintenant… trop tard pour penser à le changer » (p. 6). De même, là où Whately avait affirmé que « Le nom que j’aurais préféré comme étant le plus descriptif, et dans l’ensemble le moins critiquable, est celui de CATALLACTICS, ou “Science des échanges” » (1832, p. 6), Buchanan déclarait : « si l’on pouvait effacer le tableau » (1964, p. 217) et changer le nom de l’économie politique, il « recommanderait que nous adoptions un autre terme, tel que “catallactique” ou “symbiotique” » (p. 217).
Utilisait Whately permettait non seulement à Buchanan de parler de catallactique sans mentionner, comme on l’a dit, Mises, mais aussi de souligner un point essentiel, à savoir la différence entre échange et catallactique. Le terme grec de « katallactics » a un sens que le mot anglais n’a pas (Levy 1999). En effet, l’échange peut être utilisé pour décrire ou caractériser les « interactions » entre un individu et la nature qui l’entoure – « Robinson Crusoé pouvait “échanger” avec la nature » (Levy 1999, p. 732). A contrario, il ne saurait y avoir de relation catallactique avec la nature. Katallactics décrit des interactions personnelles, des échanges avec d’autres individus.
Buchanan fait donc une distinction cruciale entre ces deux modes d’échange. On peut même dire, en rapprochant ce qu’il écrit de ce que Kirzner écrivait, que Buchanan distingue l’échange fait par un individu qui choisit et qui résulte du choix, qui est l’échange dont Kizner parlait dans son commentaire, et l’échange qui résulte de la volonté d’échanger, de « la propension humaine au troc et à l’échange », ce « principe très négligé énoncé par Adam Smith » et que Buchanan cite dans son article (1964, p. 213). Dans cette nouvelle perspective, ce n’est pas en tant que décideurs, ou parce qu’ils font des choix, que les individus sont l’objet d’étude des économistes, mais seulement « dans la mesure où […] ils échangent, commercent, en tant qu’unités librement contractantes » (p. 221). Et on trouve également cette idée chez Whately pour qui l’homme de l’économie politique est « l’animal qui s’engage dans des échanges » (1832, p. 7).
L’exemple typique d’un individu qui ne s’engage pas dans des échanges, et dont la science économique n’a rien à faire, est Robinson Crusoé. On trouve la référence chez Whately, encore :
« Un homme, par exemple, dans une île déserte, comme Alex Selkirke, ou le personnage que ses aventures sont censées suggérer, Robinson Crusoé, se trouve dans une situation sur laquelle l’économie politique n’a pas de prise ; bien qu’il puisse, au sens figuré, être qualifié de riche, s’il est abondamment pourvu de nourriture, de vêtements et de divers conforts ; et bien qu’il puisse avoir de nombreuses marchandises sous la main, qui deviendraient échangeables et le rendraient, à proprement parler, riche, dès l’arrivée de nouveaux colons. » (1832, pp. 7–8)
Buchanan cite d’ailleurs cette même phrase dans une note de bas de page lorsqu’il insiste sur le fait que Robinson Crusoé ne se comporte pas de manière économique lorsqu’il est confronté à la rareté de ses ressources : « Le problème de Crusoé, » écrit Buchanan, « est essentiellement un problème de calcul » (p. 217), c’est-à-dire un cas typique de problèmes que les économistes considèrent à tort comme l’objet d’étude de leur discipline.
Il existe un autre type de situations dans lesquelles Robinson et Vendredi échangent, à savoir quand ils considèrent que l’autre fait partie de la nature, qu’ils traitent l’autre comme un moyen :
« Crusoé… peut traiter Vendredi simplement comme un moyen d’atteindre ses propres objectifs, comme faisant partie de la “nature” pour ainsi dire. S’il le fait, un “combat” s’ensuit, et le butin revient au vainqueur. La symbiotique n’inclue pas les choix stratégiques qui sont présents dans de telles situations de pur conflit. » (1964, p. 218)
Cet échange n’est pas non plus un objet d’étude pour les économistes. C’est un échange qui résulte aussi d’un comportement de choix. C’est l’échange qui serait étudié par une économie conçue comme une logique du choix.
En revanche, les situations catallactiques qui relèvent de l’économie, les relations d’échange que l’économiste doit étudier sont celles qui existent lorsque Robinson Crusoé et Vendredi se font face. Dans ce cas, Robinson et Vendredi s’engagent dans une relation catallactique, ils coopèrent et la relation devient « symbiotique » : « les aspects symbiotiques uniques du comportement humain, du choix humain, n’apparaissent que lorsque Vendredi met le pied sur l’île » (p. 217). Et Buchanan de rajouter, La « symbiotique » est « l’étude de l’association… mutuellement bénéfique… entre des organismes dissemblables » (p. 217) ce qui « transmet, plus ou moins exactement, l’idée qui devrait être au centre de notre discipline » (p. 217), l’idée d’une discipline qui étudie une « relation » basée sur « l’association » et « la coopération » (p. 217). Pour Buchanan l’économie est catallactique et symbiotique parce qu’elle se concentre sur les relations coopératives. Dans le paragraphe sur Mises et Hayek qu’il avait reproduit dans sa lettre à Kizner, Buchanan écrivait qu’il voulait se concentrer sur les choix qui supposent une coopération consciente entre individus et sur les institutions qui en émergent[13]. L’économie était et devait être une science de l’échange, une science qui étudie la façon dont les individus interagissent les uns avec les autres et construisent des institutions pour résoudre les éventuels conflits qui surgissent dans ces interactions. En d’autres termes, une science de la coopération.
En effet, Buchanan ne doutait pas que les individus coopéreraient, commerceraient et concevraient des arrangements pour organiser ces échanges. Pour lui, c’était un fait : « On observe que les individus coopèrent, concluent des accords, font du commerce ». (p. 219) « What Should Economists Do? » n’était pas seulement une tentative de redéfinition de l’économie. Il s’agissait d’une tentative de redéfinir l’économie pour se concentrer sur la coopération. Là encore, le lien avec Samuelson et Musgrave ou Tiebout est crucial. Ces derniers pensent que les individus sont toujours prêts à resquiller ou à cacher leurs véritables préférences s’ils en ont l’occasion. Buchanan n’ignorait certainement pas que la coopération n’était pas toujours justifiée. Il reconnaît que :
« il peut y avoir des cas où les bénéfices attendus du drainage ne sont pas suffisamment élevés pour justifier l’émergence d’un accord de coopération volontaire. De plus, la présence connue ou prévue de resquilleurs peut entraver la coopération d’individus qui autrement contribueraient au drainage. Dans de telles situations, la coopération volontaire peut ne jamais produire un résultat « efficace » pour les membres individuels du groupe. »
Mais il pensait que les individus trouveraient toujours une solution, si une solution était possible. De ce point de vue, « What Should Economists Do? » est également un document qui témoigne de l’optimisme de Buchanan et de sa confiance en la nature humaine.
Conclusion
« What Should Economists Do? » est un article plus complexe qu’on ne le pense généralement. Sur un ton polémique, Buchanan incitait ses collègues à repenser à la méthodologie de l’économie, en particulier à s’éloigner de la définition de Robbins de l’économie comme une « logique du choix », et à voire leur discipline comme une science de l’échange, de la catallaxie, une science de la coopération. Buchanan se démarquait des économistes du bien-être, comme il l’avait déjà fait avant, mais aussi et de manière plus surprenante des économistes autrichiens. Plus tard, la position de Buchanan évoluera sensiblement sur le sujet. Tout en continuant de s’opposer à Robbins, Buchanan admettra que la logique du choix et la science de l’échange sont plus proches qu’il ne l’avait initialement affirmé. En 1963, Buchanan était encore en train de construire son programme de recherche, et certaines de ses idées n’étaient pas encore fermement établies. « What Should Economists Do? » représente une étape dans l’évolution de sa pensée vers une vision plus raffinée de l’économie.
Références
[1] Arrow, Kenneth. (1951). Social Choice and Individual Values. New York: Wiley.
[2] Becker, Gary S. (1958). “Competition and Democracy”, Journal of Law and Economics, 1, 105-109.
[3] Black, Duncan. (1950). “The unity of political and economic science”, Economic Journal, 16(239), 506- 514.
[4] Bowen, William G. Richard G. Davis and David H. Kopf. (1960). “The Public Debt: A Burden on Future Generations?”, The American Economic Review, 50 (4), 701-706.
[5] Buchanan, James M. (1964). “What Should Economists Do?” Southern Economic Journal 16(2): 168-174.
[6] Buchanan, James M. (1975). “A Contractarian Paradigm for Applying Economic Theory”, American Economic Review, 65(2), 225-230.
[7] Buchanan, James M. and Milton Kafoglis. (1963). “A Note on Public Goods Supply,” American Economic Review, 53 (3): 403-414.
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[42] Whately, Richard. (1832), Introductory Lectures on Political Economy, London: B. FELLOWES, http://www.econlib.org/LIBRARY/.
[1] « Consider this paper, if you will, as an « essay in persuasion. » » (Buchanan 1964, p. 214).
[2] “I suspect your own motive, as being to roile the animals, as well as promote ‘truth’” (25 mars 1964, Frank Knight à James Buchanan, Buchanan Papers: James M. Buchanan papers, C0246, Special Collections Research Center, George Mason University Libraries, BP, « Frank H. Knight » drafts and correspondence, 1964, Box: 163, Folder: 3).
[3] “You are correct in your surmise that one important purpose was that of stirring up the animals and it did seem to arouse considerable comment” (Buchanan à Knight, 20 mars 1964, BP, « Frank H. Knight » drafts and correspondence, 1964, Box: 163, Folder: 3.
[4] Note on “What Should Economists Do ?”, (BP), “What Should Economists Do?” manuscript draft, circa 1963-1964, Box: 221, Folder: 9.
[5] Pour Buchanan, la démocratie était un moyen de réconcilier des intérêts conflictuels (1954b).
[6] Buchanan prônait une théorie des finances publiques à la Knut Wicksell, sans fonction de bien-être social, avec des décisions prises à l’unanimité.
[7] Kirzner y affirmait, en particulier, que Robbins n’est pas allé assez loin dans sa définition de l’économie comme science du choix et que c’était Mises qui en avait exploité les potentialités en poussant l’idée que l’économie devait être une science de l’action humaine et en développant la dimension praxéologique de l’économie.
[8] Kirzner à Buchanan, 23 March 1964, BP,
[9] Kirzner écrivait : “It is obvious that Buchanan’s own characterization of economics as concerned with the implications of the human propensity to truck, can, without strain, be subsumed under Robbins’ economics. After all men do seek out exchange opportunities in the course attempts to avoid ‘wasting’ their resources.”
[10] Lettre de Buchanan à Kirzner, le 25 mars 1964, BP.
[11] “I want to shut out certain major problems from our consideration.” (Buchanan à Kirzner, 25 mars 1964, BP).
[12] Buchanan dénonçait une “all-inclusive logical of human action.” (Buchanan à Kirzner, 25 March 1964, BP, « Frank H. Knight » drafts and correspondence, 1964, Box: 163, Folder: 3). Une expression que l’on peut rapprocher de l’affirmation de Frank Knight selon laquelle l’économie est “the one and all inclusive science of conduct.” (e.g. 1922, p. 471). Buchanan s’opposait donc bien à Robbins, Knight et Mises.
[13] “I concentrate only on that individual choice behavior that involves conscious cooperation among individuals, and upon those institutions that evolve as a result of such behavior.” (Buchanan à Kizner, 25 mars 1964, BP)