d’Helena Rosenblatt

éditions Marcus Haller, 2021 (336 pages)

L’ouvrage d’Helena Rosenblatt est sous-titré : De la Rome antique au XXIème siècle. Vaste programme. En fait elle balaye les siècles antérieurs à celui de John Locke pour souligner que le mot libéral a d’abord été employé pour évoquer une attitude généreuse, désintéressée, la liberalitas que pratiquaient les riches romains et qu’on retrouve encore dans les arts libéraux de la Renaissance. Ensuite, elle s’attache à raconter les fondements du libéralisme en insistant, non sans raison, sur les écrits de Benjamin Constant et sur l’importance accordée par ce dernier au fait « que c’est moins la forme du gouvernement qui compte que la quantité de gouvernement ». Elle privilégie d’ailleurs les auteurs protestants et ne fait, à tort, qu’effleurer la doctrine catholique libérale. Certes, le protestantisme est devenu libéral, mais James Simpson a eu à mon sens raison de souligner combien à ses débuts il avait été illibéral (Permanent Revolution : The Reformation and the Illiberal Roots of Liberalism, Belknap Press, and imprint of Harvard University Press, 2019).

L’auteur de cette histoire oubliée du libéralisme nous relate, de manière bien documentée, les doctrines qui se sont prévalues du libéralisme, brosse la vie de ceux qui ont porté ces idées. Mais elle ne discute pas des doctrines. Elle évoque tour à tour les libéraux classiques de Bastiat à Jacques Rueff, mais, aussi indistinctement, elle évoque les libéraux amé-ricains qui ont détourné le sens du mot « libéral » pour en faire le drapeau du progressisme sociétal. Et même chez les libéraux classiques, elle cherche surtout les propos qui pourraient leur faire parrainer la sociale démocratie : elle note que Say justifiait la réglementation de l’industrie par les gouvernements ou que Mill « lutta systématiquement contre toute politique fondée sur les principes du laissez-faire ». Elle va jusqu’à classer le solidariste Léon Bourgeois parmi les libéraux, ou presque, comme elle le fait pour les deux Anglais Hobson, keynésien avant Keynes, et Hobhouse qui voulait récon-cilier socialisme et libéralisme.

En fait, elle n’a pas cherché à comprendre le substrat des doctrines libérales qui plongent leurs racines dans l’école de Salamanque, elle ne cite ni Gournay ni Turgot. Elle n’aime ni les libéraux ni les catholiques, ce qui nuit à son analyse.

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Journal des Libertés

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