La réforme engagée par M. Macron au printemps 2018 voulait ajouter à l’article 1 de la constitution française que la France « agit pour la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et contre les changements climatiques ». Apparemment anodine, ce projet de modification, même si peut-être il n’aboutit jamais, marque une volonté de transformation en profondeur de notre droit et annonce l’affaissement de notre civilisation. Car ces quelques mots introduiraient dans la constitution cette idée que la nature, ici au titre notamment de la diversité biologique et du climat, doivent être protégés pour eux-mêmes et pas seulement pour le bien être des hommes. Cette décision marque d’ailleurs tout à la fois une prétention incroyable de l’Homme de vouloir infléchir le cours du climat comme demain peut-être la course des astres d’une part, et une régression plus incommensurable encore à vouloir conserver le climat en l’état plutôt que de s’adapter à ses changements comme l’humanité le fait depuis toujours d’autre part. Elle est le signe contradictoire de l’orgueil démesuré de l’homme qui croît pouvoir arrêter le cosmos et de son renoncement à gérer et surmonter les transformations de la terre : le Ministre de l’écologie, avant qu’il ait démissionné, voulait mentionner aussi dans la constitution la « finitude des ressources » et les « limites planétaires ». Alors que l’hubris d’Alexandre, de César, de Justinien, de Frédéric de Hohenstaufen, de Napoléon tendait à conquérir le monde, celle de ces écologistes saisis par la peur de leur ombre consiste à tenter désespérément d’interrompre le cours du monde dans le frigidaire de l’histoire. Elle s’inscrit en fait dans le mouvement écologique profond qui ne conçoit désormais l’homme que comme un animal parmi d’autres, un élément parmi d’autres de la planète qui, elle, mérite plus d’attention et de protection que lui. Dans ce mouvement, la qualité de « personne » est partagée avec les animaux et les droits sont étendus à tous les êtres vivants et bientôt aux choses elles-mêmes.  Cette confusion volontaire redonne à la nature la place des dieux anciens dans un retour aux origines. Elle représente une régression, et ouvre à de nouvelles formes d’animisme qui risquent de remiser le progrès de notre civilisation aux oubliettes.

 

Le droit animal

Divers mouvements se développent en faveur de la reconnaissance des animaux comme des êtres ayant des droits. Le 28 janvier 2015, en France, l’Assemblée nationale a voté une loi pour reconnaitre désormais l’animal comme « être vivant doué de sensibilité » dans le Code civil (nouvel article 515-14) et ne plus le considérer comme un bien meuble (article 528) comme il l’était antérieurement. Cette évolution du droit a pu permettre de faire mieux respecter les animaux. Mais tout aussitôt, s’est constitué un groupe de travail, au sein même de l’ordre des Avocats de Paris, pour défendre les droits des animaux et créer un code qui leur soit dédié. Ailleurs, aux Pays-Bas[1], en Espagne, en Allemagne … des partis des droits animaux commencent à percer. Aux Etats-Unis, l’animal law a élargi son champs depuis les années 1970 et s’intéresse à toutes les situations qui impliquent un animal, de la maltraitance de chiens domestiques aux conflits en cas de divorce (mais qui va garder le chat ?)… Maintenant, le droit animal est étudié à l’université dans divers pays tels que le Canada et l’Australie, mais aussi le Brésil, le Kazakhstan, l’Espagne, la Suisse, la Finlande, la Pologne, le Royaume-Uni… En Suisse, le code civil traite du sort des animaux comme de celui des enfants depuis une loi du 4 octobre 2002 qui donne au juge la mission d’attribuer « en cas de litige la propriété exclusive à la partie qui, en vertu des critères appliqués en matière de protection des animaux, représente la meilleure solution pour l’animal » et le cas échéant de prévoir « le placement provisoire de l’animal » [2].

 

Une « personne non humaine »

Peu à peu l’animal est reconnu comme une personne, même si elle est qualifiée de non humaine.  Ce fut le cas de Sandra, un orang-outan de 29 ans qui vivait au zoo de Buenos-Aires depuis vingt ans et auquel un tribunal argentin a reconnu son droit de vivre en liberté en tant que « personne non humaine » au motif que la bête avait des liens affectifs.

La fondation Affinity qui existe dans 70 pays et a 1800 salariés défend les droits des animaux et a émis une charte qu’elle décline en cinq articles pour notamment défendre par la loi « Les droits des animaux de compagnie … à l’instar des droits de l’homme ». Elle considère que « Tout acte impliquant la mort non nécessaire d’un animal de compagnie est un biocide, autrement dit, un crime contre la vie ». La Suisse (depuis 1992), l’Allemagne (depuis 2002) et le Luxembourg (depuis 2007) incluent la protection animale dans leur constitution. La Belgique compte trois ministres dédiés au « bien-être animal », dissocié du Ministère de l’agriculture et de l’environnement. L’association Droits des Animaux demande que soient reconnus aux animaux les droits fondamentaux que les humains s’accordent à eux-mêmes : droits à la vie, à ne pas être maltraité ni emprisonné injustement.

Des professeurs de droit, comme l’américain Gary Francione, demandent que soient reconnu aux animaux une personnalité juridique pour la seule raison qu’ils sont sensibles et souffrent : « Dire qu’un être est une personne, c’est simplement dire que l’être à des intérêts moralement significatifs, que le principe d’égale considération s’applique à cet être, que cet être n’est pas une chose »[3]. Le pas est alors franchi pour que le Nonhuman Rights Project du juriste Steven Wise cherche « à faire reconnaître la personnalité juridique des grands singes, éléphants, dauphins et baleines, — c’est-à-dire d’en faire, devant les tribunaux américains, des sujets ayant droit à certains droits fondamentaux… »[4].

 

La frontière brisée entre nature et culture

Disparaissent ainsi toutes limites entre nature et culture. Si les animaux ont des droits, la nature entière doit en avoir aussi. Ainsi il a été demandé par la Bolivie de mettre la question des Droits de la Terre Mère (Rights of Mother Earth) à l’ordre du jour des Nations unies[5]. Ce qui a abouti début janvier 2012 à une proposition de Déclaration Universelle des Droits de la Terre Mère[6] qui donne à tous les « êtres », définis comme « les écosystèmes, les communautés naturelles, les espèces et toutes les autres entités naturelles qui font partie de la Terre Mère », des droits équivalents aux droits des humains. Là où jusqu’à présent la terre toute entière devait être respectée dans l’intérêt des hommes, elle doit l’être désormais pour elle-même comme l’affirme clairement cette Déclaration :

Tout comme les êtres humains jouissent de droits humains, tous les autres êtres ont des droits propres à leur espèce ou à leur type et adaptés au rôle et à la fonction qu’ils exercent au sein des communautés dans lesquelles ils existent.

Les droits de chaque être sont limités par ceux des autres êtres, et tout conflit entre leurs droits respectifs doit être résolu d’une façon qui préserve l’intégrité, l’équilibre et la santé de la Terre Mère.

 

En attendant que cette Déclaration soit adoptée par l’assemblée Générale de l’ONU, Les droits de la Terre-Mère ont d’ores et déjà été reconnus par les Constitutions de la Bolivie et de l’Équateur. Certes ces pays ont un peuplement indigène précolonial encore important dont il reste les traditions et la mémoire. Partout dans le monde, les premiers hommes sont restés longtemps très dépendants de leur environnement naturel et des éléments de la nature dont ils ont fait souvent leurs dieux et leurs diables. On en retrouve encore la croyance chez ce qui reste de ces peuples, des aborigènes d’Australie aux Amérindiens américains et à diverses tribus africaines. Les traditions spirituelles asiatiques considèrent volontiers que la vie doit être respectée sous toutes ses formes et que l’univers est un tout dans lequel l’homme a sa place sans en être forcément le centre. Matthieu Ricard note dans son blog, le 7 mai 2011, que « Selon le bouddhisme, effectivement, il n’y a pas d’âme et il n’y a pas non plus de ‟personne” considérées comme des entités distinctes. Il n’y a qu’un flot dynamique d’expérience, instant après instant, que l’on appelle la conscience. Dans le monde de l’inanimé, il est admis que « rien ne se crée, rien ne se perd ». Ce qui explique la métempsychose, cette réincarnation ou renaissance d’être en être différents. Cette conception de la nature explique aussi la vénération de la « vache mère » nourricière. Mais le mouvement écologique profond va plus loin en voulant donner des droits aux pierres et aux arbres, à l’instar de Michel Serres qui veut que « les objets eux-mêmes deviennent sujets de droit »[7]pour que s’établisse une réciprocité entre l’homme et la nature : « …autant la nature donne à l’homme, autant celui-ci doit rendre à celle-là devenue sujet de droit »[8].

De l’anthropomorphisme à l’anthropologie

Nul ne sait exactement quand a émergé l’homme du milieu naturel qui l’a accueilli, quand le singe a pris les traits d’un humain dans la chaîne de l’évolution. Divers caractères peuvent sans doute permettre de qualifier cette transformation, de l’enterrement de ses morts à un langage conceptuel…. Dans tous les cas, ce passage semble avoir été marqué par la reconnaissance par le nouvel homme de sa distinction d’avec son environnement. Il s’est soudain reconnu différent de la nature et des autres êtres. La bible dit qu’il eut tout d’un coup honte de sa nudité comme signe de cette identité propre à préserver. Et il devint capable d’extérioriser son environnement en le dessinant comme autre sur les parois de ses cavernes. Une vision animiste a longtemps encore habité les civilisations anciennes et les a empêchées de donner toute son amplitude à l’humanité. L’Occident est né en rupture avec cette conception anthropomorphique, en adoptant une vision anthropologique qu’il a en même temps contribué à approfondir et valoriser. A l’origine de cette révolution mentale et spirituelle furent les Hébreux, les premiers à avoir adoré un Dieu qui ne se confondait pas avec la nature, qui n’était pas à l’image de l’homme ou des animaux, et les premiers à refuser les idoles (cf. le veau d’or) et à placer leur croyance dans un Dieu créateur distinct et néanmoins proche de l’homme qu’il voulut à son image. Et plutôt que de lier les hommes à leur destin comme le faisaient encore les dieux grecs et romains, le Dieu des Hébreux leur donne la maîtrise de la terre ainsi que le raconte la Genèse :

01 « Dieu bénit Noé et ses fils. Il leur dit : « Soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre.

02 Vous serez la crainte et la terreur de tous les animaux de la terre, de tous les oiseaux du ciel, de tout ce qui va et vient sur le sol, et de tous les poissons de la mer : ils sont livrés entre vos mains. »[9]

Il leur donne aussi la liberté, sous réserve qu’ils observent sa loi, que traduisent l’interdiction d’approcher l’arbre de la connaissance (Genèse 2), puis les dix commandements et toute l’histoire biblique après que la loi ait été enfreinte. Mais cette liberté n’est donnée qu’aux hommes, c’est-à-dire aux personnes car seuls les humains sont capables d’entretenir un rapport avec Dieu observe la Bible[10].

 

Le droit est exclusivement humain[11]

La loi est faite pour les hommes parce que la justice est propre aux hommes, pas aux animaux, en ce sens qu’elle est ordonnée à leur fin. Le droit est le privilège des hommes, ainsi que le rappelait Hugo Grotius (1583-1645) en puisant chez les Anciens[12] :

« À proprement parler, il n’y a qu’un être qui soit susceptible de Droit et d’Obligation. C’est ce que remarque très bien Hésiode, un des plus anciens poètes grecs : Jupiter, dit-il, a établi que les poissons, les bêtes farouches et les oiseaux se dévorent les uns les autres, parce que la justice n’a point lieu entre eux ; mais il a prescrit aux hommes la loi de la justice, qui est la chose la plus excellente. Cicéron[13] remarque qu’on ne dit pas d’un cheval, ou d’un lion, qu’il ait quelque justice. Plutarque, dans la vie de Caton l’Ancien, dit que naturellement, nous observons les lois et la justice envers les hommes. Lactance relève l’excellence des hommes par-dessus les bêtes en ce que les bêtes , étant  dénuées de sagesse, et suivant le seul penchant de leur nature, qui porte chaque animal à s’aimer soi-même, se font du mal les unes aux autres pour se procurer quelques avantages à elles-mêmes : car elles ne savent pas ce que c’est que de nuire en vue de nuire, et avec connaissance du mal qu’il y a en cela; au lieu que l’homme, qui connaît le bien et le mal, s’abstient de nuire, lors même qu’il y trouve du désavantage. On trouve quelque chose de semblable chez Polybe … »

La justice est la seule vertu à ne pas être individuelle, mais partagée, réciproque, praticable seulement dans le rapport à autrui, qui ne peut pas être un rapport avec des bêtes non douées de raison. Il n’y pas de droit autre que moral de la personne sur elle-même. Mais la question du juste est partout dans les relations des hommes : entre les associés qui partagent leurs gains, quand le père punit ou récompense ses enfants, dans l’attitude du client qui restitue la monnaie trop perçue… C’est ce qui permet de comprendre l’objet essentiel de la justice qui est de rendre à chacun ce qui lui revient. On rend la justice d’ailleurs. Il ne saurait y avoir cet échange, à la base de la justice, avec les animaux.

La justice n’est pas compassion ou sentiment, mais doit permettre l’exercice par chacun de ses droits privés, pour que chacun ait son dû. Le droit est ce qui permet aux hommes de vivre en société comme les latins l’ont exprimé dans leurs douze tables de bronze exposées au forum au milieu du Vème siècle avant JC. Ce droit est propre aux humains qui sont plus que des animaux puisqu’ils sont des animaux politiques selon le mot d’Aristote, c’est-à-dire faits pour vivre ensemble et riches de leur vie commune.

A dire vrai, ils sont plus que des animaux politiques. Ils sont des personnes. Le mot « personne » pourrait venir du grec du grec « prosopon » signifiant face, visage, figure humaine. Il pourrait puiser son origine incertaine, du mot phersu en étrusque ou de persona en latin, dans le masque de scène des acteurs. La personne est celle qui déclame et tient un rôle dans le jeu social. En droit romain, la personne est celle qui a des droits.  Boèce pour sa part définit, à l’aube du Moyen Age, la personne comme un être de raison :

« Si la personne se trouve seulement dans les substances et en celles-là seules qui sont douées de raison ; si en outre toute substance est une nature [c’est à dire a une différence spécifique]; si enfin, la personne ne réside pas dans les êtres universels, mais dans les individus; alors la définition de la personne est trouvée : c’est la substance individuelle d’une nature raisonnable. »[14]

Mais Boèce va plus loin et prend en compte dans la personne son aspiration à s’élever. Dans tous les cas, il en ressort que la personne est l’attribut de l’homme, ou des dieux, mais pas des animaux ou des choses.

 

La confusion funeste

La sensibilité au plaisir et à la douleur, l’instinct maternel, la capacité à trouver de la nourriture ou un abri ne suffisent pas à définir une personne. Ces traits sont dans les caractères humains et animaux, mais l’homme est beaucoup plus que cela. Lui seul est capable de la liberté qui suppose réflexion et permet l’exercice de responsabilités. Donner des droits aux animaux, voire aux choses, revient à dénaturer la condition humaine elle-même en la réduisant au niveau des bêtes. Cette volonté absconse s’inscrit dans la recherche d’un égalitarisme extrême qui, à défaut de pouvoir instituer une égalité impossible entre les hommes, voudrait étendre sa prétention égalitaire au reste du monde. Il ne faut plus seulement que les hommes soient égaux, mais qu’ils le soient avec les animaux, voire avec les choses. A défaut de savoir élever tous les hommes, ils préfèrent les abaisser tous.

Ce que veulent les écologistes durs est peut-être moins de protéger la terre que de la contrôler, de mettre les hommes sous le boisseau d’un nouveau pouvoir tyrannique. Après que le communisme ait sombré, ils y cherchent un substitut. En annonçant des catastrophes planétaires, ils espèrent que tous accepteront de s’en remettre à un Léviathan protecteur. En donnant des droits à des animaux incapables de les exercer, il apparaît tout aussitôt la nécessité de confier au pouvoir en place le soin de les représenter contre les hommes qui leur font du mal. Entre 1991 et 2010 le canton de Zurich, en Suisse, a créé la fonction officielle d’« avocat du bien-être animal » chargé de «représenter officiellement les intérêts des animaux dans les procédures criminelles et administratives, recruter des témoins et faire appel en cas de jugements trop laxistes protégeant les propriétaires ». Si le droit animal est reconnu pleinement, l’Etat se chargera de défendre les bêtes pour infliger aux humains toutes sortes de restrictions et contraintes. Ne pourrions-nous pas être coupables de pulvériser de l’insecticide contre les mites dans nos placards, de tuer les moustiques et autres bestioles dérangeantes… ? Et quand le droit protègera les choses, l’Etat veillera à ce que nous ne coupions plus de fleurs, que nos enfants ne chassent plus les papillons. Peut-être faudra-t-il renoncer à utiliser tout le sable qui permet de construire des maisons en béton. Un retour à l’âge des cavernes sans plus pouvoir tuer les carnassiers qui nous menacent pour se nourrir ?

Mais sans attendre d’en arriver à ces dérives extrêmes, la subjectivité du droit ouvre déjà la porte à l’arbitraire. « Les yeux et les oreilles sont de mauvais témoins pour les hommes qui ont une âme barbare »[15] notait Héraclite pour dire que croire aux sensations, dépourvues de raison, pour comprendre le monde et y agir n’est pas le propre de l’homme. Après que les Hébreux aient reconnu ce dernier comme différent des bêtes et du monde, la philosophie grecque fonde la connaissance humaine sur le raisonnement démonstratif, méthodique qui n’appartient pas aux animaux.[16] Non seulement la sensibilité ne suffit pas à établir le droit, mais elle en détruit le fondement objectif établi sur l’observation de la nature humaine et l’analyse rationnelle. Si le droit des animaux est introduit dans le prétoire, l’intelligence en sera évacuée, par la définition qui fait que les animaux en sont privés, et le droit lui-même avec elle. C’est déjà par la substitution de la volonté du législateur à la rationalité du juge que les nominalistes ont permis que la loi devienne discrétionnaire. En considérant désormais que la sensibilité gouvernerait la législation et le jugement des magistrats, la porte serait définitivement ouverte à des décisions purement subjectives, d’autant plus qu’il s’agirait d’interpréter la sensibilité animale avant que sans doute, demain, la sensibilité du prévenu ou des cocontractants détermine le jugement dans les procès pénaux ou civils en lieu et place de la rationalité qui doit y présider. Ce serait bien sûr le moyen de modeler les condamnations à la tête du client selon le processus qui anime généralement les totalitarismes de toute nature.

 

Conclusion

Il ne s’agit pas pour autant de traiter sans décence les animaux et plus généralement la nature. Tout au contraire, car l’Homme ne suit pas son chemin indépendamment de son cadre de vie. C’est son intérêt de veiller à la préservation dynamique de la nature et à son renouvellement incessant. Mais ce doit aussi, et peut-être plus encore, être un souci moral, car l’Homme ne saurait respecter son prochain s’il ne portait pas, plus généralement, d’attention à l’ensemble de son environnement.

Notre civilisation forgée dans le creuset de Jérusalem, Athènes et Rome est née de la reconnaissance de la personne humaine, différente de son environnement, et de ses droits. Il n’était pas utile de vouloir changer la constitution française qui a déjà intégré en 2004 dans son corpus la Charte de l’environnement dont l’article 1er mentionne que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». La nouvelle révision de la constitution voulue par MM Macron et Hulot sur ce sujet n’a donc pas été engagée en 2018 sans d’autres arrière-pensée. Elle n’a l’air de rien et il faut pourtant s’en méfier car selon les propos de Nietzsche :

« Ce sont les paroles les plus silencieuses qui apportent la tempête. Ce sont les pensées qui viennent comme portées sur des pattes de colombes qui dirigent le monde. »[17]

 

[1]                  Aux Pays-Bas, le Partij voor de Dieren, soit « Parti pour les animaux », s’est lancé en 2003 et a obtenu deux sièges aux législatives de 2006. Il a depuis investi six conseils municipaux (dont Rotterdam et Utrecht), puis obtenu deux élus au Sénat et envoyé une tête de liste au Parlement européen en 2014.

[2]                  Article 651 a

[3]                  Cité par Jean-Baptiste Jeangène Vilmer dans L’éthique animale, Que sais-je ? n° 3902, p.77

[4]                  Ibidem, p. 79

[5]                  http://boliviarising.blogspot.fr/2009/12/bolivia-we-must-support-universal.html

[6]                  http://rio20.net/fr/propuestas/declaration-universelle-des-droits-de-la-terre-mere

[7] Michel Serres, Le Contrat naturel, Champs, Flammarion, 1992, p.66

[8]                  Idem, p.67

[9] Genèse 9, 1-4- traduction liturgique officielle en français de l’Association Épiscopale Liturgique pour les pays Francophones. Cf. également Genèse, 1, 28 sq.

[10]                Cf. Bible et morale, Commission Biblique Pontificale, Nouvelle Cité, collection racines, 2009

[11]                Cf. Jean-Philippe Delsol, L’injustice fiscale ou l’abus de bien commun, Desclée de Brouwer, 2016, chapitre VI

[12]                Hugo Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, chapitre 1er, Ce que c’est que la guerre et le droit, livre I, chapitre I, traduction de Jean de Ribeyrac, 1724

[13]                De Officiis Livre. 1, Chap XVI

[14]                Les variations de Boèce sur la personne par Maurice Nédoncelle, Revue des Sciences Religieuses Année 1955 29-3 p. 217.

[15]                Fragment 107

[16]                Cf. ouvrage posthume de Jean-François Mattéi, La pensée antique, PUF, 2015

[17]                Frédéric Nietzsche – Ainsi parlait Zarathoustra, traduction par Henri Albert, Société du Mercure de France, Œuvres complètes, vol. 9, p. 211.

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Journal des Libertés

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