Des idées des Lumières aux démocraties libérales

Les Lumières et le libéralisme sont étroitement liés. La philosophie des Lumières a mis un terme à la raison d’être de la société d’Ancien Régime et de la monarchie de droit divin, pour placer l’individu rationnel au centre des intérêts. Le libéralisme met l’accent sur l’individu qui pense et agit de manière autonome, qui peut revendiquer sa liberté et doit l’exercer pour son propre bien. Dans l’esprit des libéraux, la liberté n’est toutefois pas absolue. Car la liberté sans restriction mène à l’anarchie, dans laquelle seul l’individu le plus fort est vraiment libre (Hobbes 1651). Le Libéralisme se distingue de l’anarchie car la liberté de l’individu s’arrête là où celle d’autrui est affectée. Pour garantir la liberté de chacun, il faut alors un État fort qui garantisse les droits fondamentaux (égalité civique, sécurité, propriété, etc.), et donc la liberté de tous. Les grands penseurs des Lumières et du libéralisme s’opposent au féodalisme et à l’absolutisme. Bien que le pouvoir de l’État soit nécessaire pour garantir la liberté, celui-ci doit rester fortement limité afin de protéger l’individu et sa liberté du despotisme (Hobbes 1651, Locke 1690). Avec Locke (1690) et son traité « Two Treaties of Government », et plus spécifiquement avec Montesquieu (1748) et son traité « L’esprit des lois », l’idée de la séparation classique des pouvoirs entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire était née. Les fondations des institutions démocratiques modernes étaient posées. Avec la Révolution française, les privilèges furent définitivement abolis et marqua le triomphe des Lumières.

Les grands intellectuels français ont durablement marqué les Lumières et notre conception moderne de la société et de l’État. L’idée fondamentale de l’individu libre et rationnel est encore aujourd’hui le fondement des démocraties libérales. Les institutions démocratiques reconnaissent l’individu comme le souverain ultime, qui cède son pouvoir uniquement pour une durée limitée en le déléguant à des représentants. Le pouvoir de l’État n’est qu’un pouvoir emprunté et partagé à plusieurs reprises. Les trois pouvoirs classiques travaillent ensemble, tout en se distinguant et se limitant entre eux : c’est le principe des pouvoirs et contre-pouvoirs ou « checks and balances ». Le partage du pouvoir peut non seulement se faire selon les pouvoirs classiques mais aussi de manière territoriale. L’idée d’un partage territorial du pouvoir au sein d’un État s’appelle le fédéralisme et est le résultat d’une décentralisation politique.

Quelle est la part de liberté restante ?

Depuis longtemps déjà, dans les démocraties libérales modernes d’Europe occidentale et anglo-saxonnes, l’État ne se limite plus à garantir les droits fondamentaux. Les démocraties occidentales sont désormais devenues des États tentaculaires, quasi omniprésents. Mais les différences entre ces États sont importantes et le cas de la Suisse se distingue particulièrement. Nous argumentons que cela est fortement lié à l’organisation institutionnelle avec ces multiples façons de limiter le pouvoir. Les institutions spécifiques à la Suisse – la démocratie directe et le fédéralisme prononcé – ont réussi à davantage limiter le népotisme et l’accaparation de pouvoir par l’État (voir tableau 1 ci-dessous).

Tableau 1 – Comparaison d’indicateurs entre démocraties libérales d’Europe de l’Ouest.

IndicateursSuisseFranceAllemagneItalie
Dépenses publiques (% PIB)32.7055.3044.8648.5
Dette publique (% PIB)43.80145.8178.66183.87
Indice mondial de liberté (Freedom House)96909490
Indice de liberté économique (Heritage Foundation)81.965.772.564.9
PIB par habitant50’20033’80038’30030’400
Indice mondial de l’innovation65.555.057.345.7
Indice de bonheur7.5086.7147.3126.488
Confiance envers le gouvernement84.6341.0465.4137.45

Notes : Dépenses et dette publique, année : 2021 ; L’indice mondial de liberté (Freedom House) va de 0 à 100, année : 2021 ; L’indice de liberté économique (Heritage Foundation) va de 0 à 100, année 2021 ; PIB par habitant mesuré à prix courants, en standard de pouvoir d’achat, année : 2019 ; L’indice mondial de l’innovation va de 15 (Angola) à 65.5 (Suisse), année : 2021 ; L’indice de bonheur est un indice allant de 0 à 10 (meilleure valeur), année : 2020 ; Confiance envers le gouvernement, année : 2021. Sources: Freedom House (2021), Helliwell, Layard, Sachs et De Neve (2021), Heritage Foundation (2021), OECD (2021a, 2021b, 2021c), OFS (2021), WIPO (2021). 

Comparé à la France ou l’Allemagne, les taux d’endettement et de dépenses publiques de la Suisse sont restés nettement inférieurs. Ainsi, l’immixtion de l’État dans la société reste à un niveau moindre. Une plus grande partie des fruits de la productivité individuelle reste donc entre les mains des individus. Les indicateurs relatifs à la liberté individuelle confirment que cette dernière a pu rester à un niveau élevé en Suisse. Est-ce que l’accroissement de la liberté individuelle se fait au détriment de la prospérité, de la capacité d’innovation, du bonheur, de la performance de l’État ou de la confiance en l’État ? Les indicateurs pertinents montrent le contraire. Le PIB par habitant en Suisse est environ 50% plus élevé que celui de la France. La Suisse est aussi régulièrement en tête des classements internationaux en ce qui concerne la capacité d’innovation et le bonheur des citoyens, la mesure la plus directe de l’utilité individuelle. La performance de l’État semble supérieure à la moyenne en Europe de l’Ouest et la confiance envers le gouvernement est plus élevée que chez ses voisins. L’idée, à l’origine française, d’un pouvoir étatique limité pour le bien des individus semble encore valide aujourd’hui et, si l’on prend l’exemple de la Suisse, elle est même couronnée de succès.

Les nombreuses recherches suggèrent que la démocratie directe et le fédéralisme sont les principaux facteurs derrière le succès de la Suisse (par exemple : Frey, 1994 ; Frey et Stutzer, 2002 ; Feld et Matsusaka, 2003 ; Feld, Schaltegger et Schnellenbach, 2008 ; Feld, Kirchgässner et Schaltegger, 2010 ; Funk et Gathmann, 2011 ; Berset et Schelker, 2021). Ces deux mécanismes favorisent la limitation du pouvoir de l’État : une fois via le citoyen qui ne délègue pas son pouvoir intégralement, et une autre fois via la répartition territoriale qui empêche le gouvernement central de prendre toutes les décisions.

Dans la suite de cet essai, nous nous concentrons sur l’analyse du fédéralisme. Nous présenterons d’abord le fédéralisme suisse. Puis, nous nous intéresserons à la théorie économique du fédéralisme. Notre objectif est d’y présenter les avantages théoriques, ainsi que les principes qui doivent être respectés pour que le fédéralisme ne s’embourbe dans des impasses politiques inefficientes et ne devienne ainsi dysfonctionnel. Nous présenterons également les possibles risques liés à la décentralisation et au fédéralisme lorsque ces principes clés ne sont justement pas respectés. Puis, pour illustrer nos propos, nous prendrons pour exemple la gestion de la pandémie de COVID-19 durant laquelle la Confédération aura bénéficié d’une autorité extraordinairement forte. Nous utiliserons cet exemple pour démontrer que, malgré la place centrale tenue par le fédéralisme dans la réussite et la prospérité de la Suisse, le respect des principes fondamentaux n’est pas une tâche aisée, ni un acquis définitif (Schelker et Schmutz, 2020 ; Schaltegger, Schelker et Schmutz, 2021).

Le fédéralisme en Suisse

« La Suisse ne ressemble à aucun autre État, soit par les événements qui s’y sont succédés depuis plusieurs siècles, soit par la situation géographique, soit par les différentes langues, les différentes religions, et cette extrême différence de mœurs qui existe entre ses différentes parties. La Nature a fait votre État fédératif. Vouloir la vaincre ne peut être d’un homme sage. »

Le 10 décembre 1802, c’est ainsi que Napoléon Bonaparte décrit la Suisse dans une lettre adressée aux députés des cantons. Deux mois plus tard, le 19 février 1803, il écrit l’Acte de Médiation qui marquera la fin de la République Helvétique, une parenthèse centralisée dans l’histoire du pays. La Suisse devient alors une Confédération d’États (Fankhauser, 2009, 2011 ; Stüssi-Lauterburg, 2012).

Ce ne sont que des dizaines d’années plus tard que naîtra la Constitution fédérale de 1848, après une succession de différents et de conflits entre les cantons, menant jusqu’à la guerre civile du « Sonderbund » en 1847. Dans cette nouvelle Constitution fédérale, les cantons décident de confier un certain nombre de tâches à un nouvel échelon institutionnel fédéral. C’est un acte de centralisation de certains pouvoirs, de certaines compétences, et de certains devoirs des cantons. Les cantons avaient alors déjà compris que certaines tâches et responsabilités seraient gérées de manière plus efficace à plus large échelle. Notons donc que le fédéralisme ne consiste pas en la décentralisation complète des compétences. 

Dans la Constitution Fédérale de la Confédération suisse, il est stipulé à l’article 3 que les pouvoirs n’ayant pas été attribués à la Confédération restent entre les mains des cantons. La même logique s’applique aux échelons inférieurs : les cantons, via leurs propres constitutions, décident individuellement quelles tâches seront déléguées aux communes, le plus bas niveau institutionnel du pays. C’est toute la subtilité d’un État fédéral : il faut que les compétences soient attribuées au bon niveau institutionnel selon le principe de subsidiarité.

L’organisation décentralisée de la Suisse se démarque de celles de ses voisins sur plusieurs aspects : Tout d’abord, l’autonomie des échelons inférieurs de l’état, des cantons et des communes, est particulièrement forte. Ensuite, le contrôle des représentants politiques par la démocratie directe permet au peuple de sanctionner les abus. Le pays est donc dirigé par le peuple, au lieu que le gouvernement ne dirige le peuple. Finalement, ce sont les cantons qui décident des compétences attribuées au niveau fédéral. Ainsi toutes les décisions de centralisation doivent être justifiées et acceptées dans un processus démocratique.

Contrairement à la Suisse, la décentralisation en France est surtout administrative et non politique. Les décisions sont principalement prises par le gouvernement central et les municipalités doivent les suivre lors de la mise en œuvre. Ce type de décentralisation administrative n’est donc pas comparable avec l’organisation suisse où les échelons communaux et cantonaux prennent les décisions et les mettent en application de manière totalement autonomes. Le fédéralisme a de nombreux avantages, mais ces derniers ne tombent pas du ciel et n’assurent pas une meilleure performance économique aussi simplement. L’efficience du fédéralisme dépend du respect de certains principes fondamentaux.

Les avantages de la décentralisation selon la théorie du fédéralisme

Dans sa description de la Suisse, Bonaparte identifiait l’une des principales raisons d’être d’une organisation décentralisée. Les hétérogénéités régionales sont particulièrement marquées en Suisse, mais ce n’est pas l’unique pays où de telles disparités existent. Que ce soit linguistique, géographique, démographique, religieux, ou culturel, il existe des divergences régionales au sein de chaque pays. En bref, la Suisse n’est pas le seul pays où la décentralisation fait sens.

Un premier mécanisme formalisé par Tiebout (1956) présente un enjeu central dans la théorie du fédéralisme. Il développe le concept-clé du « vote avec les pieds » qui décrit la possibilité qu’ont les citoyens de se déplacer dans une juridiction où ils pourront y maximiser leur utilité. Ce concept est comparable à celui de la défection, proposée plus tard par Hirschman (1970). Le modèle de Tiebout repose notamment sur l’hypothèse que les citoyens sont mobiles, c’est-à-dire qu’il n’y aurait pas ou très peu de coûts de mobilité.

Les informations pertinentes sont naturellement très dispersées à travers un pays. Oates (1972) suggère que les politiciens locaux ont une meilleure connaissance des préférences de leurs circonscriptions, ce qui permet de fournir des services publics mieux adaptés. Dans une même logique, Hayek (1945) argumente que l’ensemble du savoir d’une société est l’agrégat des connaissances individuelles. Dans le cas du fédéralisme, les informations sont connues au niveau local et une organisation unitaire ne captera pas toutes les subtilités locales. Il est inefficace de confier les décisions à un unique échelon gouvernemental alors que celui-ci ne connait pas nécessairement les spécificités locales.

Non seulement le fédéralisme facilite l’utilisation des connaissances locales et permet de différencier les politiques selon les différentes situations et préférences, mais il agit aussi comme un laboratoire d’idées (Oates, 1972, 1999). Pour se démarquer des autres communes, les décideurs doivent innover et trouver de nouvelles politiques pour gagner en efficience. Cette multitude de manières de faire permet ainsi un apprentissage par l’expérimentation. Avec plus de décisions différentes vient la possibilité d’identifier quelles sont les mesures les plus adaptées et les plus efficaces. Une juridiction peut alors observer la réussite des politiques implémentées autour d’elle et bénéficier de l’expérience acquise par ses concurrentes pour prendre les meilleures décisions possibles. Le fédéralisme améliore ainsi le processus de création de nouvelles politiques publiques (Schnellenbach, 2003).

Dans le cas concret de la Suisse, on observe par exemple une forte différence cantonale dans les dépenses publiques et dans l’activité régulatrice (Lüchinger et Schelker, 2016). Les variations des taux de dépenses cantonales et du nombre d’actes normatifs modifiés chaque année (lois, ordonnance, arrêtés, etc.) illustrent aussi parfaitement l’existence de disparités en termes de préférences entre les cantons (voir figure 1). L’activité régulatrice pouvant être un moyen de s’adapter aux spécificités locales ou de se distinguer des concurrents pour attirer (ou conserver) des contribuables. Cette activité suggère que le laboratoire d’idées existe bien.

Une structure décentralisée, avec de plus petites juridictions, offre la possibilité d’expérimenter sans que les conséquences soient trop lourdes. A l’opposé, si une nouvelle politique publique est prise au niveau national, les risques sont portés par le pays tout entier. Dans le cas Suisse, les mauvaises décisions d’une commune ou d’un canton et leurs conséquences sont limitées à ses citoyens et n’affecteront peu (voire pas du tout) ceux des plus de 2000 autres communes ou 25 autres cantons. Par contre, si la nouvelle politique se révèle être un succès, toutes les autres juridictions peuvent alors s’en inspirer.

La décentralisation permet également de mettre en compétition les différentes juridictions. Cette concurrence sera bénéfique aux citoyens pour de multiples raisons. Une première conséquence positive découle directement de la mise en compétition d’une multitude de juridictions en   lieu   et  place  d’ un  unique  gouvernement.  Sans  concurrence,   le gouvernement central serait alors capable d’agir à la manière d’un monopoleur et cela sans que les citoyens n’aient de moyen simple d’exprimer leur mécontentement par la défection (Hirschman, 1970). Avec la décentralisation, le nombre d’options disponibles pour les citoyens augmente et cela offre la possibilité de sanctionner (par la mobilité ou les urnes) un gouvernement se comportant comme monopoleur ou « Léviathan » comme dénoncé et modélisé par Brennan et Buchanan (1980). Ces derniers développent l’hypothèse d’un « État Léviathan », c’est-à-dire s’immisçant de différentes manières dans les affaires privées pour y maximiser son revenu fiscal. Ils argumentent notamment que le potentiel d’exploitation fiscale du gouvernement diminue lorsque le nombre de juridictions augmente (Brennan et Buchanan, 1980 : 185). C’est la concurrence qui permet aux citoyens d’imposer des limites à un État cherchant à abuser de son pouvoir dans son propre intérêt.

Figure 1 – Taux de dépenses cantonales (en % du revenue moyens) et activité régulatrice des cantons (nombres d’actes légaux)

Note : Les lignes colorées représentent les cantons de Appenzell Rhodes-Extérieures (en vert), Zurich (en bleu), et Genève (en rouge). Sources : représentations des auteurs basées sur les données de Lüchinger et Schelker (2016), Frey et Schaltegger (2016), Schaltegger et Gorgas (2011), l’Office fédérale de la statistique (OFS), l’Administration fédérale des finances (AFF).

Dans le cas de la Suisse, les communes et les cantons sont par exemple autorisés à récolter un impôt sur le revenu des personnes physiques et morales pour financer les différentes tâches dont elles sont responsables. Puisque les responsabilités des communes et cantons sont clairement définies et comparables, il est nettement plus facile de juger les décisions prises car elles le sont dans des dimensions et des contextes similaires. Les décideurs, face à la menace du vote par les pieds, devront alors lutter afin de conserver leur base fiscale. La mise en concurrence des juridictions locales restreint la maximisation du revenu par l’imposition (Persson and Tabellini, 1994, 2000). Cette mise en compétition pour la conservation de la base fiscale incite donc les politiciens locaux à prendre les meilleures décisions possibles pour satisfaire les citoyens, sans imposition abusive des contribuables.

La compétition pourrait tout de même être bénéfique lorsque la base fiscale est immobile. Besley et Case (1995) argumentent que les juridictions peuvent réagir aux politiques fiscales voisines même sans avoir à se battre pour conserver leurs contribuables. Selon eux, la capacité qu’ont les citoyens à comparer les performances entre juridictions suffit à inciter les politiciens locaux à prendre de bonnes décisions. En effet, si ces derniers souhaitent être réélus, ils chercheront à appliquer les meilleures politiques possibles même si les citoyens ne se déplacent pas d’une juridiction à l’autre. Les possibles comparaisons permettent donc d’imposer une discipline aux politiciens et de leurs donner les incitations à agir dans l’intérêt de la circonscription, et non dans leurs propres intérêts.

La tenue d’élection régulière au niveau communal et cantonal permet aussi de discipliner les élus s’ils dévient trop fortement des préférences de la population. La combinaison de la décentralisation et des incitations découlant des élections, et donc de la possibilité d’être sanctionné aux prochaines élections, poussent les décideurs à se rapprocher des préférences. Cela renforce l’efficience dans l’utilisation des ressources car les citoyens sont capables de comparer avec les juridictions voisines et d’en tenir compte aux élections suivantes. Cela contribue à réduire les pertes d’utilité de la société. C’est le mécanisme de la prise de parole de Hirschman (1970) qui est ici à l’œuvre. Il est important de souligner la différence clé entre fédéralisme et décentralisation administrative : elle réside dans ces incitations à se rapprocher des préférences locales. C’est précisément ce que la décentralisation administrative n’est pas capable d’apporter. Les décisions centrales vont négliger les préférences de petites régions car elles n’ont pas un grand poids électoral en comparaison des grandes villes et grandes régions. 

L’introduction de coûts associés à la défection n’est cependant pas problématique, bien au contraire. Par exemple, Kirchgässner et Schelker (2010) argumentent qu’une hausse de la décentralisation va au contraire diminuer les coûts d’ajustement et de défection associés à la migration vers une autre juridiction. Prenons le cas d’un citoyen habitant un pays avec un gouvernement entièrement centralisé prenant toutes les décisions. Si les décisions sont particulièrement différentes des préférences de ce citoyen, sa seule alternative d’émigration se trouve dans un autre pays. Les coûts de défection (donc de la mobilité) et d’ajustement seraient très élevés parce que la totalité de l’environnement institutionnel et social de ce citoyen serait modifié. En comparaison, un citoyen vivant dans un État fédéral pourrait choisir parmi un large éventail de juridictions, et donc de politiques publiques. Les coûts de la mobilité sont nettement réduits et il y a plein de possibilités pour améliorer sa situation en se déplaçant dans la juridiction qui applique les politiques publiques correspondant le mieux à ses préférences. Selon cette logique, plus le nombre de municipalités en concurrence est grand, plus les coûts seraient diminués et les bénéfices élevés. De plus, les citoyens verraient leur ensemble de choix augmenter et seraient ainsi mieux à même d’éviter les déviations contraires à leurs préférences personnelles. Une structure centralisée donne de mauvaises incitations aux décideurs qui font face à une population n’ayant pas de possibilité de défection. Une situation décentralisée permet au moins de se déplacer dans une autre juridiction concurrente.

Il est pertinent de se demander si un nombre autant élevé de petites juridictions ne contribue pas à augmenter la taille de l’État plus que de raison. La répartition des tâches et des compétences au bon niveau juridictionnel est ici fondamentale pour éviter un tel problème. Si les principes-clés sont respectés et que la répartition se fait de manière intelligente, alors les évidences empiriques montrent que la décentralisation permet au contraire de réduire la taille du gouvernement et d’améliorer l’efficience des dépenses publiques (Feld, Kirchgässner et Schaltegger (2010) ; Berset et Schelker (2021)). Finalement, comme Brennan et Buchanan (1980 : 185) l’argumentaient, la décentralisation permet de limiter l’immixtion du gouvernement et de lutter contre l’État Léviathan. Dans ce qu’ils appellent « l’hypothèse de décentralisation », les auteurs arrivent à la conclusion qu’une plus grande décentralisation des dépenses et du pouvoir de taxer la population permet de réduire l’intrusion du gouvernement dans l’économie.

Pour bien fonctionner le fédéralisme nécessite des conditions-cadres

Ces avantages ne sont cependant pas assurés automatiquement. Il y a certains principes qui doivent être respectés afin d’assurer que le fédéralisme puisse fonctionner efficacement. Premièrement, l’attribution des compétences au bon niveau institutionnel est la clé de voute d’un système fédéraliste. Il est primordial que l’État Fédéral assure une répartition des tâches et des compétences claire et ordonnée. L’attribution des différentes tâches doit suivre quelques critères. Ainsi, le gouvernement central devrait se charger des tâches où les hétérogénéités locales jouent peu de rôle. En d’autres termes, si les préférences et contextes ne diffèrent pas à travers les régions, il n’y a pas d’intérêt à différencier les politiques publiques. Les tâches qui nécessitent une coordination des décisions devraient aussi être attribuées au gouvernement central. Finalement, les tâches pour lesquelles il y a un fort potentiel d’économies d’échelle peuvent également être centralisées. À l’inverse, les tâches décentralisées devraient être celles où il est possible de prendre en compte des préférences différenciées géographiquement et de tenir compte de contextes économiques et sociaux hétérogènes. Logiquement, il fait sens de décentraliser les tâches et décisions pour lesquels il y a peu d’économies d’échelle possibles. Les externalités associées à certaines décisions prises au niveau local pourraient pousser à réorganiser l’attribution des tâches en fonction de la couverture géographique (Oates, 2006). Cependant, il est parfois aussi possible d’éviter ces débordements par le règlement d’ententes inter-juridictionnelles ainsi que par différentes stratégies d’internalisation. Il est même possible que les externalités affectent les juridictions de manière hétérogènes, et ici encore, il serait préférable de laisser les décideurs locaux utiliser les stratégies d’internalisation qui correspondent le mieux grâce à leurs connaissances approfondies des situations locales.

Une distribution claire des tâches est fondamentale, mais il faut ajouter à cela un principe essentiel à respecter pour que les incitations données aux politiciens (centraux et locaux) les poussent à décider de manière optimale pour la société. Il s’agit du principe de responsabilité. Ce principe stipule que le pouvoir de décision et les responsabilités doivent toujours être liés. La possibilité d’agir et les conséquences des actes doivent aller de pair. Il en va de même pour les dépenses publiques et le pouvoir de lever des impôts. Recettes et dépenses doivent elles aussi se situer à un même niveau institutionnel, dans une même « main », en respectant l’équivalence fiscale – une conséquence naturelle du principe de responsabilité (Olson, 1969). Lorsque l’équivalence n’est pas respectée, la séparation des dépenses et de la taxation à différents niveaux a tendance à faire augmenter la taille des budgets de manière inefficiente (Winer, 1983). Par contre, quand la responsabilité et le pouvoir de décider font un, et que l’équivalence fiscale est respectée, le principe de responsabilité l’est également et cela assure que le fédéralisme opère dans les bonnes conditions.

Toutes ces conditions de base seraient également inutiles sans la possibilité de faire entendre sa voix par les urnes. Pour que la concurrence politique de Besley et Case (1995) puisse être efficace, il est nécessaire que la pression électorale soit suffisamment forte et fréquente. La tenue régulière d’élections avec suffisamment de candidats sert à discipliner les politiciens locaux. Ces derniers, pour espérer être réélus, doivent alors prendre des décisions qui satisfont son électorat. Sans cette pression électorale le risque est grand que les décideurs abusent de leurs pouvoirs. Le lien avec le principe de responsabilité devient ici très clair : pour pouvoir évaluer les compétences des élus, il faut pouvoir clairement identifier qui décide afin que ce dernier en assume aussi les conséquences aux urnes.

L’importance des conditions-cadres du fédéralisme : la gestion de la COVID-19 en Suisse 

L’exemple de la gestion de la pandémie de la COVID-19 en Suisse illustre bien que, même dans un État historiquement fédéral, il est possible que le fédéralisme devienne le bouc-émissaire. Les critiques parlent d’une soi-disant cacophonie à cause des différentes mesures prises par les cantons. Le fédéralisme n’est, à notre sens, pas la cause de ce manque de clarté. Deux problèmes sont identifiables dans la gestion de la crise : une mauvaise répartition des tâches et un non-respect du principe de responsabilité.

La loi sur les épidémies définit deux niveaux de risques en cas de danger épidémique. Il y a d’abord la « situation particulière », dans laquelle le Conseil Fédéral (l’organe exécutif de la Confédération) peut, après consultation avec les cantons, ordonner des mesures allant jusqu’à l’obligation vaccinale. Lorsque la situation est spécialement inquiétante, la Confédération peut proclamer la « situation extraordinaire ». Dans ce cas-ci, le Conseil Fédéral peut imposer des mesures à tout le territoire suisse. Lors de la première vague de la pandémie en Suisse, l’exécutif a recours pour la première fois à la loi sur les épidémies. La situation particulière est d’abord proclamée le 28 février 2020, puis, la situation extraordinaire sera déclarée entre le 16 mars et le 19 avril 2020. Aujourd’hui, le pays reste en situation particulière et cela depuis juin 2020.

La pandémie, les situations particulière ainsi qu’extraordinaire auront donc mis en suspens le fédéralisme en Suisse. Pourtant, même dans la crise causée par la COVID-19, il y aurait de quoi tirer profit de la décentralisation. En effet, encore aujourd’hui et face à une cinquième vague, les situations demeurent particulièrement hétérogènes. Non seulement les taux de reproduction effectifs, Re, divergent entre les cantons (le maximum est de 1,41 à Genève et le minimum de 1,02 à Nidwald), mais c’est également le cas pour les taux de vaccinations allant de 55.5% en Appenzell Rhodes-Intérieures à 72.1% dans le canton de Neuchâtel (OFSP, état au 06.12.2021). Les situations restent également différentes en termes de densité de population, de démographies et de préférences. Laisser les cantons agir pourrait ainsi permettre plus de flexibilité et de justesse dans les mesures grâce aux meilleures connaissances des élus locaux. Des mesures uniformes, dans un contexte hétérogène, font qu’elles interviendront tardivement pour certains cantons et trop tôt pour d’autres. Il en va de même pour la rigueur des mesures : elles seront parfois trop laxistes et parfois trop dures.

Il est également particulièrement dangereux de n’avoir qu’une seule stratégie face à un risque autant incertain. Si cette dernière n’est pas adaptée à l’arrivée d’un nouveau variant, les conséquences pourraient être désastreuses. Autoriser différentes approches locales permettrait de pouvoir comparer plus facilement l’efficacité des politiques dans la lutte contre le virus. Cela responsabiliserait un plus grand nombre de décideurs et ce serait faire usage de la concurrence politique évoquée précédemment. L’apprentissage sur l’efficacité des mesures serait accéléré tout en réduisant le risque de conséquences graves.

Alors étant donné les nombreux avantages qu’offre le fédéralisme, pourquoi est-ce que la Suisse a autant de problème dans la gestion de la pandémie ? Elle devrait pourtant pouvoir être nettement plus performante grâce à son organisation politique et la qualité de ses institutions. Le premier problème est que la répartition des compétences entre cantons et Confédération est complètement floutée par la situation particulière. Il est difficile de savoir quel échelon est responsable des décisions. Les responsabilités pour les décisions désagréables et politiquement risquées peuvent être renvoyées d’un niveau à l’autre de l’État comme une patate chaude. Le principe de responsabilité n’est alors plus respecté. La situation particulière instaure une sorte d’irresponsabilité institutionnelle via la mutualisation des compétences entres les cantons et la Confédération. Dans cette organisation, plus personne ne doit prendre la responsabilité, et personne ne veut être celui qui est responsable de mesures particulièrement dures et largement discutées. Les cantons eux-mêmes se rencontrent dans des conférences cantonales pour discuter des décisions à prendre ce qui contribue encore plus à éviter la prise de responsabilités et à ralentir la mise en œuvre des mesures. La situation particulière institutionnalise donc une dissociation de la compétence d’agir, des conséquences et de la responsabilité de celles-ci. Il en va de même pour le financement des mesures et le non-respect de l’équivalence fiscale : en fin de compte, le Conseil Fédéral ordonne, mais les cantons contribuent financièrement aux mesures.

Le deuxième problème, très lié, est celui de l’attribution inefficiente des compétences aux bons niveaux institutionnels. Il faudrait que les compétences soient enfin clairement attribuées selon les critères énoncés précédemment. Ainsi, l’achat de vaccins, les aides économiques pour assurer la survie de secteurs économiques, les aides pour assurer un revenu aux ménages, et le traçage des contacts sont des exemples de tâches qui devraient être centralisées car le contexte géographique n’a pas une importance significative. À l’inverse, des mesures comme la fermeture d’établissements scolaires ou de lieux de divertissement (restaurants, bars, discothèques) auront un impact complètement différent selon le contexte local. C’est le type de mesures qui devraient être prises au niveau cantonal.

À première vue, mettre en œuvre des mesures différentes dans chaque canton pourrait amener une cacophonie non-souhaitable et une lenteur d’action que l’uniformisation résoudrait. Ce serait cependant oublier les avantages du fédéralisme qu’il faudrait abandonner par la même occasion : flexibilité, responsabilisation, mise en concurrence des réponses. Le seul défi est de permettre au fédéralisme de rester fonctionnel. Les critiques adressées à une gestion décentralisée de la crise ne font donc pas sens. Premièrement, les cantons ont démontré à plusieurs reprises désormais qu’ils étaient capables d’agir autant, voire plus rapidement, que la Confédération. Deuxièmement, ils ont également su collaborer pour internaliser les débordements en étendant la couverture géographique des mesures sans avoir besoin de centralisation ou de longues discussions. En effet, la collaboration a lieu car les situations sont comparables entre plusieurs cantons : les intérêts sont alors naturellement très comparables. Grâce à cela, la coordination inter-cantonale de certaines mesures se fait rapidement. Finalement, la difficulté à s’informer sur les décisions prises par un canton ou l’autre n’est pas un problème découlant du fédéralisme, mais plutôt d’une politique des médias qui ne laissent aucune chance aux médias locaux (Berset et Schelker, 2018). Les médias nationaux, eux, n’ont aucune incitation à couvrir médiatiquement l’intégralité des modifications des règles cantonales : les coûts pour y parvenir sont élevés et il y a peu d’intérêt pour une large part de l’audience à connaître les règles d’un canton autre que le sien et celles de ses voisins directs.

Conclusions

D’après la théorie du fédéralisme et les résultats des recherches dans le domaine, il apparaît que cette structure organisationnelle apporte de nombreux avantages économiques et politiques. La décentralisation en Suisse apparaît comme un facteur-clé de sa réussite.

La décentralisation de certaines compétences permet une flexibilité en matière de politiques publiques. Chaque juridiction peut ainsi répondre aux besoins spécifiques de ses citoyens et se rapprocher de leurs préférences, améliorant ainsi le bien-être sociétal. De plus, en responsabilisant les élus locaux, les politiques publiques bénéficient des connaissances particulières qu’ils ont des régions et des citoyens. En rapprochant les décideurs des bénéficiaires, il contribue à améliorer la participation aux décisions collectives.

Plusieurs avantages découlent de la mise en concurrence des juridictions du même échelon institutionnel. Cela permet notamment la mise en place du laboratoire du fédéralisme : la possibilité de comparer une grande quantité d’idées différentes dans des cadres et contextes institutionnels similaires. Ce laboratoire génère ainsi des connaissances qui bénéficient à toutes les juridictions et les poussent à s’améliorer. De plus, la tenue d’élections régulières limite les abus de pouvoir des politiciens qui peuvent être sanctionnés dans les urnes. La concurrence politique donne des incitations à implémenter des politiques allant dans le sens du peuple. Et, en cas de désaccord avec le reste des électeurs, il est alors possible de se déplacer vers une juridiction correspondant mieux à ses préférences. En ce sens, grâce à l’augmentation des choix offerts aux citoyens, le fédéralisme contribue aux libertés de chacun.

Il reste cependant nécessaire de respecter certaines conditions pour exploiter tous les bienfaits potentiels du fédéralisme. Les juridictions doivent bénéficier d’une autonomie suffisante dans la prise de décision. La démocratie doit permettre de sanctionner les politiciens agissant dans leurs propres intérêts. L’enchevêtrement politique est à éviter à tout prix, car il amène dans son sillage une irresponsabilité institutionnalisée. La répartition des tâches et des compétences se doit d’être parfaitement claire. Finalement, il est nécessaire d’avoir une congruence institutionnelle : les principes de responsabilité et de subsidiarité doivent absolument être respectés.

Nous l’avons vu avec la gestion de la pandémie de la COVID-19, le fédéralisme reste menacé en tout temps. Il semble, à notre sens, nécessaire de défendre ce système qui a fait ses preuves, autant théoriquement qu’empiriquement, et qui contribue depuis longtemps à la prospérité et au succès de la Suisse. Avec ces nombreux avantages, peut-être même qu’il inspirera de futures réformes ailleurs dans le monde, au profit des libertés de chacun.

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